dimanche 16 décembre 2007

Pour une thérapie thermonucléaire.

Je suis atomisé, anéanti, détruit ou plutôt déconstruit....et pourtant heureux et soulagé. Je danse en pleurant, je pleure en riant. Je me sens bien et un peu plus vivant qu'avant cette relation.

C'était la fête d' Halloween quand j'ai rencontré C. Je ne sais par quel miracle j'avais réussi à coucher avec elle quelques jours plus tôt. L'alcool associé au caractère peut farouche de C. me semble être la seule explication. Je ne me souvient pratiquement de rien. La vodka, le vin et la bière ont dissout ma mémoire...
Un peu plus tard je lui écrivais un mail pour l'inviter à prendre un verre. La deuxième rencontre est agréable. Elle m'invite chez elle: début de l'histoire.

Tout se passe bien. Tout se passe merveilleusement bien. Etant toujours curieux et ouvert à toute nouvelle expérience menant à la découverte de soi et au dépassement de la peur, je réponds rapidement à ses attentes.
Quand elle mets ma mains dans ses cheveux, je les attrappe, je les tire....quand elle me glisse le foulard autours du cou, je sais qu'elle m'invite à m'en servir...et je m'en servirai. Je l'étranglerai en la prenant par derrière. Elle me dira qu'elle découvre cette sensation et que c'est merveilleux,que c'est une nouvelle drogue, qu'elle plane.....la note est donnée. La relation est parfaitement définie. Très rapidement je jouerai le rôle du maître et elle de l'esclave, mais c'est moi qui serai à son service.Le jeu consiste autant à éprouver mes propres limites que les siennes...notre complicité sexuelle évolue : je la fouette avec ma ceinture, je l'attache et un jour, je ne sais plus très bien comment, on décide d'essayer le bondage. C'est une première pour elle comme pour moi.

Et quelque chose d'encore indéfini grandit en moi. J 'apprends à m'affirmer. Je prends confiance. Je la fais jouïr. J'ai ce pouvoir, cette capacité.
Elle aime mon sexe. Elle me le dit, me le redit encore et encore. Elle est insatiable et je le suis aussi....elle veut toujours baiser et ma queue lui obéit au doigt et à l'oeil. Elle trouve que j'ai une grosse queue. Je mets du temps à jouïr. Je n'ai rien d'un précoce...je serais même plutôt tardif...bref: j'assure. C'est maintenant une réalité. Je le sais. Plus rien ne pourra m'en faire douter. J'avais tellement peur de décevoir. Je vivais tellement dans la peur de ne pas être à la hauteur des attentes de l'autre....

C'est fini. Elle me quitte. Je ne rentrerai pas dans les détails. Cette fille est aussi compliquée que moi....vraiment rien à m'envier de ce côté.

Alors c'est ça: c'est fini et jamais je ne me suis révélé. Jamais je ne lui ai vraiment dit ce que j'éprouvais pour elle. Toute cette relation n'aura été qu'un jeu de dupes. Je suis resté sur la réserve: toujours. Si elle me dit: "ce que tu aimes en moi, c'est de pouvoir me donner la fessé*sourire*".
Je réponds: "oui, d'ailleurs si tu pars, je la donnerai à mon pote." ....et tout cela n'est qu'une fuite par l'ironie....pour ne pas avoir à dire ce que je ressens vraiment....bien sûr que non, ce n'est pas ça. Bien sûr que l'ancre est fixée en haute mer, là où le fond n'est que pénombre....

Hier matin, je me réveille à ses côtés. On discute. On essaie de définir une fois de plus les problèmes qui nous séparent. Je me sens lâche...je sais que c'est fini.....alors quoi...je vais m'éclipser sans jamais lui avoir dit. Peur orgueilleuse d'avouer quand c'est trop tard. Peur d'être grotesque. Peur de ne pas être à la hauteur du sentiment que j'éprouve....C'est vraiment trop lourd. Il faut que je jette. ça m'obsède. Il faut que je lui dise avant de partir.....et d'une voix tremblante à peine perceptible j'y arrive enfin....
-C.............le problème...c'est que je suis amoureux..alors ne m'en veux pas si je t'évite..............même si ça ne doit rien changer, je voulais te le dire ouvertement pour pouvoir me regarder le miroir sans me dire que j'ai été lâche....
Elle se lève et va prendre un douche. Pendant ce temps, je fonds en larmes.
Je ne sais même pas si je pleure à cause de cette rupture ou si les larmes sont l'évacuation soudaine de ce que je retiens depuis toujours. Quand le barrage saute, l'eau peut enfin couler....la pression accumulée pendant autant d'années est trop grande pour pouvoir la retenir...

Le barrage vient de sauter....un des derniers verroux vient de voler en éclat....trop longtemps j'ai vécu avec cette peur d'aimer. Trop longtemps j'ai fuit. J'ai tenu les autres à distance. Trop longtemps j'ai fait semblant d'être fort et indifférent...

Aujourd'hui j'ai le sentiment d'assumer ce sentiment. C'est comme si je me réconciliais avec une partie de moi-même. Je me sens ouvert. Je n'ai plus rien à cacher. Je me sens grandi, soulagé...et malheureux. Bien sûr....n'est-ce pas ce que j'ai toujours fuit.
Mais la tristesse est jouïssive quand elle est appariée au sentiment de se révéler et de s'accepter vraiment....au sentiment de devenir enfin un homme.
Je porte cet amour orphelin en l'assumant pleinement.....j'aime.
Je suis capable d'aimer...et je sais maintenant que je n'aurai plus rien à cacher à personne. Les prochaines rencontres seront plus faciles. Je serai moins maladroit. Je n'ai plus peur de ce que je suis ou de ce qui risque de m'arriver. Je ne maintiendrai plus la distance....tout me semble plus facile maintenant. Je me sens capable de dire à une fille qu'elle me plaît sans avoir peur de souffrir, car je sais que cette souffrance est belle....et je n'ai plus à calculer notre relation en fonction de ce qu'elle va penser de moi.
J'aime une personne pour ce qu'elle est, et non en fonction de ce qu'elle risque de me faire.....
Et je n'aurai pas à éviter C. Je sais qu'elle peut maintenant devenir une amie. Il faudra du temps avant de faire le deuil de cet amour mais je n'ai plus peur de souffrir en la voyant.....

Je suis heureux et soulagé....... et un peu plus vivant qu'avant cette relation.

mardi 23 octobre 2007

ça trompe énormément.

N'existe-t-il donc rien dans la psyché humaine qui soit une valeur absolue, nécessaire, inexorable ou incommutable?
La psyché humaine est un édifice érigé par sa culture et a pour fondement, les certitudes codifiées transmises par cette culture...mais l'être humain est capable d'auto-observation et d'auto-critique, capable donc, de se remettre en question, de progresser et de changer la nature même de son être. Les valeurs qu'il porte en lui évoluent avec le temps et son rapport au monde en est radicalemnt changé...
Mais même si ces nouvelles certitudes le guident vers une relation aux autres plus sereine,elles n'en sont pas nécessaires, inexorables ou ncommutables que les valeurs et l'ensemble de l'être qui existaient 20 ans plus tôt...le sentiment de connaissance de soi n'est que l'illusion d'avoir la capacité de définir les autres et soi-même, afin de pouvoir se comparer à eux et s'accepter parmi eux...mais tout reste changeable et superflu. (la psychologie moderne nous apprend que même la nature des émotions est propres à chaque individu, et ne sont que des traits mis en place par sa compréhension singulière des chose et son histoire perso...)
Mes propres mécanismes mentaux me sont superflus et ne me sont nécessaires que dans un environnement donné et connu.
Le sentiment profond d'un moi stable et définissable n'est qu'une illusion maintenue par les mécanismes complexes de la mémoire cognitive...mais c'est une illusion nécessaire....
Il est impérieux de préserver cette illusion du moi stable pour que ces valeurs 'artificielles' engendrent une jouïssance, des émotions, des sentiments...artificiels.

Aussi, la libération de soi passe par cette conscience du superflu transitoire ou illusoire afin de considérer l'être avec une grande légèreté.

lundi 22 octobre 2007

Peep show

j'entre dans une pièce qui ressemble à un couloir. Tous les murs sont rouges. Je remarque immédiatement un drôle de manège: quelques hommes regardent les vidéo porno vendues en solde derrière des vitrines, ils passent près des portes de cabines disposées en demi-cercle autour de ce qu'on devine être le plateau.Ils semblent hésiter, comme si ils n'osaient pas. Je ne connais pas le système.y' a-t-il un signal?Un début et une fin de spectacle?..il n'y a personne à la caisse de change. Pas de prix affiché....je tourne un peu pour me fondre aux autochtones en adoptant leur comportement....je regarde distraitement les cassettes en essayant de comprendre comment on sait si ça a commencé et si il faut acheter un billet....je remarque les autocollants sur les portes des cabine. Ils affichent 1 et 2 euros. Le guichet vide sert juste à changer les billets en monnaies...les cabines fonctionnent avec des pièces. J'entre dans l'une de celles-ci.(pas trop anxieux) Je me trouve face à une petite fenêtre translucide. Je glisse un pièce d'un euro dans la fente: chlac! la fenêtre s'ouvre . Une fille couchée sur un plateau semble sursauter. De la position couchée elle se met debout sur les genoux. elle est belle: jeune, un peu ronde. ses seins sont splendides. Son cul est hallucinant.Son visage est très beau.Elle commence à se caresser les seins, les fesses, enlève son soutien, passe sa mains entre ses jambe, se donne une petite claque sur la fesse droite, me regarde fixement à chaque fois que son visage se trouve en face de moi....chlac! la fenêtre se referme.
Pas plus d'une minute...continue à alimenter le mur et la fenêtre s'ouvrira mon enfant....je n'ai pas assez d'argent sur moi. Je reviendrai un autre jour. Je sors. Je vois un autre type rentrer....j'ai compris le manège: au-dessus des portes, les lumières vertes ou rouges signalent l'occupation de la cabine. Quand les cabines sont occupées depuis un moment, la fille est déjà à poil, tu peux entrer et t'épargner l'effeuillage...j'imagine qu'il existe plusieurs profils de clients et que les économes fonctionnenet comme ça...

C'est exactement ce dont j'ai besoin...j'ai besoin qu'elle me regarde la regardant. J'ai besoin d'apprendre à soutenir la possibilité de son mépris. D'assumer parfaitement mon regard sur son corps et mon désir de ce corps...sous se yeux. J'ai besoin de m'affirmer coupable pour ne plus avoir à ressentir le moindre sentiment de culpabilité.

J'y retourne bientôt.

dimanche 21 octobre 2007

Changement cognitif=changement de jugement.

L'approche s'inverse donc peu à peu. Le sexe n'est plus que l'impulsion primaire qui existechez tous les individus...et ma vision de l'autre se débarrasse lentement de la nécessité de surveiller cette menace pulsionnelle à chaque instant,comme si elle allait provoquer le courroux de la femme qui l'identifierait...
A vec l'amenuisement de cette vigilance extrême provoquée par la peur de la pulsion "prohibée", la nature du regard que je pose sur les femmes change peu à peu, et la nature de mes intentions aussi: le type qui essayait de se faire accepter pour oucher à l'objet de son désir avec un sentiment de culpabilité(et de peur) lié au jugement sévère présupposé de la femme, se transmue en type qui essaie de faire la connaissance de l'objet de son désir(la femme dont la sexualité n'est plus qu'une évidence banale).

Le sexe est là, partout...et les occasions d'avoir une expérience sexuelle sont nombreuses. La pratique sexuelle est à considérer comme un acquis, comme une évidence ou comme un fait...
Il s'agit juste d'aller vers l'autre pour en faire la connaissance...
Le désir n'est donc plus lié qu'aux attraits d'une personne, pas à son sexe. Le sexe n'est plus que la jouissance ultime et partagée de deux être qui se rencontrent et s'attirent. La nature du désir est liée à la personne psychologique et physique. Et elle n'est pas parasitée par le désir sexuelle rendu trop présent par la peur d'un hypothétique jugement de la femme.

samedi 20 octobre 2007

L' esprit est la parure de la pulsion sexuelle.

...et ma vision des choses s'inverse peu à peu...lentement pour remplacer une connaissance dysfonctionnel par un savoir acquis avec le temps:
Je parlerai en terme TCC(thérapie cognitive et comportemantale):
Cognition dysfonctionnelle:
-au coeur de la femme il y'a les sentiments, le respect, l'amour....et le sexe n'est que sédiment d'une bestialité lointaine , concédée par la femme à l'homme, après s'être assurée que ses intentions sont bien plus nobles....le sexe n'est donc pas un plaisir pour la femme....c'est une concession culpabilisante faite à l'homme qui se sait guidé par une pulsion sexuelle....

Cognition de remplacement(la réalité):
-au coeur de la femme(comme de l'homme) il y a une pulsion, un impulsion organique, animale...et autours de ce coeur, il y a la personnalité, l'esprit.....
La femme agit d'abord en réponse inconsciente à cette pulsion.Un homme qu'elle croise dans la rue lui plaît et son attention est éveillée. son instinct s'ébranle. La petite lumière rouge s'allume.....ensuite on fait connaissance.....
Concrètement: la femme cherche la relation sexuelle.
Que cela devienne une certitude intime et l'anxiété n'existera plus....ça deviendra une certitude intime par l'expérience concrète....
(tjrs en tcc: 1ere phase: remplacement cognitif. 2eme phase: expositions répétées.)

D'une cognition à l'autre, on passe d'un noyau culturel vers une animalité refoulée à:
une animalité assumée, vers un aspect culturel secondaire.

Chez la femme comme chez l'homme, le premier temps est celui de la pulsion....

*L' esprit est la parure de la pulsion sexuelle...
et une rencontre sexuelle est une recherche de ce plaisir primaire....avec une approche personnelle, un jeu personnel...*

mercredi 17 octobre 2007

Dame nature

Nous vivons dans un monde vu a travers un filtre de perceptions construit par notre évolution singulière. Il faut du temps pour remettre notre compréhension des choses en question.
Il faut comprendre la façon de voir des autres.....et il faut encore plus de temps pour l'adoper en acceptant cette erreur qui est au fondement de notre être....
Chercher une perception nouvelle d'une relation particulière à l'autre revient à éprouver ses propres critères analytique pour rechercher la nature de la plus grande liberté qui soit...

J'aimerais revenir sur l'aspect fictionnel de la relation sexuelle dans un porno.( j'ai acheté un prno en début de semaine. Le genre de film que je cherchais: pas de scénario, pas de musique.Juste six scènes qui se succèdent).
La femme qui joue un rôle dans un film établit une séparation nette entre le corps de l'homme et sa personne, son esprit ou ses critères de jugement....elle vit sa relation au corps comme une réalité uniquement physique, organique et animale: tu me montres ta verge en érection et je te montre ma vulve...ouh! ouh! grwar!
-madame, vos yeux sont les joyaux que seuls vos traits pouvaient accueillir...
-hougawawa!
-...
Même si la tentation est grande, cette importante révélation ne doit pas devenir un prétexte à la misogynie.
-Grwarg, houwawa!
.....Mais la tentation est grande...

Pour qu'il soit possible de ne considérer que le corps aucune autre intention n'existe, pour elle, chez l'homme avec qui elle a une relation, que celle de répondre à une pulsion......et comme elle n'essaie pas de formuler les pensées, intentions ou jugements de l'homme, elle est libre d'agir selon ses propres pulsions.
Tu me plais. Je te plais. Allons-y.

La perception qui se dessine de plus en plus clairement avec le temps est celle d'une femmes-animale, répondant à ses pulsions par besoin naturel et plaisir assumé.
La pulsion et la recherche du mâle font battre le coeur de la femme....autours de ce coeur de guenon sont venus se greffer son éducation, ses expériences, ses codes culturels assimilés tout au long de sa vie, sa sophistication(le jeu des apparences), ainsi que le profil de l'homme qui va l'attirer,elle.
Comme l'homme, la femme est un singe sophistiqué...et elle l'assume(quand elle n'est pas névrosée). Elle cherche l'homme et s'excite de voir son sexe en érection....

On est loin de la perception dysfonctionnelle que je porte en moi depuis toujours: celle d'une femme sacrée qui ne consent à prêter l'inestimable joyaux orgasmique qu'à quelques privilégiés ne pensant jamais au sexe, car cette pensée salit l'image de la femme et revient à lui manquer de respect...

A l'origine il y'a la pulsion sexuelle. Tout ce qui se construit autours n'est que sa protection pour préserver l'intégrité de l'individu: le respect etc.

mardi 16 octobre 2007

Homme-animal.

Réconcilier l'image de la vulve à celle de la femme. L'idée que l'homme se fait de la vulve détermine la relation qu'il entretiendra avec la femme....

Voir la femme comme un être qui assume son sexe jusque dans la position animale...
(ces notes jétées sur papier pendant la journée révèlent la nature du blocage qui subsiste en moi.)

L'évolution de la culture a conduit à une séparation de l'être social et de l'être sexuel.
L'être social ayant, en général, du mal à affirmer son être sexuel de façon parfaitement libérée...
Ce refoulement, ou rejet du sexe procède à la division du corps sexué et de l'esprit, des organes génitaux et de la personnalité, de l'animalité et de la culture.
La culture du refoulement sépare l'être de son corps animal...
La refonte des deux en une entité unique et homogène , en un bloc de granite est la seule façon de se libérer des répressions culturelles les plus insidieuses: bien intégrer le fait que l'homme, comme la femme éprouve une réelle jouïssance en régressant jusqu'à leur identité animale originelle, et que tous deux y trouvent une jouissance faite d'abandon, de sueur, de sensualité, de brutalité ou de délicatesse etc.

Une logique de libération par l'expérimentation est nécessaire à la libération de l'être et à son épanouissement: se rapprocher de la nature profonde, originelle et animale pour se défaire des aliénations culturelles...

Si les prostituées ou les actrices de porno peuvent vivre leur métier comme une fiction,ou avec détachement c'est qu'elles sont capables de tenir leur rôle à distance en lui pretant leur corps et leur sexe. Tout cela n'est possible que par la banalisation du sexe en le vivant comme une fonction ordinaire du corps et avec une parfaite connaissance et acceptation de la nature primaire et animale de l'Homme.

La femme sait le désir qu'elle éveille chez l'homme et ça l'excite.
L'homme sait le désir qu'il éveille chez la femme et ça l'excite.
Les gens qui vivent leur sexualité de façon épanouie vivent ça comme une évidence.

En ce qui me concerne, même si j'ai parfaitement assimilé ces propositions , elles me restent comme étrangères....je pense qu'il faut passer à l'acte de façon répétée pour l'intégrer parfaitement....

Je vais donc fréquenter plus assidument le milieu de la prostitution, du sexe, de la pornographie....je commence ma thérapie par le sexe....et je ne peux m'empêcher de penser à la trilogie de 'la crucifixion en rose' d'Henry Miller.C'est lui qui m 'a inspiré,il y a bien longtemps, la volonté de devenir 'un bloc', d'être entièrement en accord avec soi-même par l'expérimentation sexuelle, ......les choses qui m'ont le plus marquées en littérature pendant toutes ces années d'isolement sont restées gravées très clairement dans ma mémoire, comme une compréhension du monde qu'il faudrait appliquer plus tard, pour transformer le savoir en connaissance....

dimanche 14 octobre 2007

La prostitution.

Après quelque temps d'absence, j'ai décidé de reprendre ce blog là où je l'avais laissé et de ne pas le virer comme on trace un trait sur un passé auquel on a plus envie de penser.
Je ne serai jamais le plus assidu des blogueurs, mais je viendrai y' ajouter les réflexions qui me semblent dignes d'intérêt et sont liées à ma progression et aux fluctuations de ma perception du monde (un peu pompeux et nombriliste, mais on ne se refait pas radicalement par simple volonté...la nature de la volonté étant en partie déterminée par ce que notre évolution personnelle a fait de nous).

Alors voilà:A la mi-Aout j'ai trouvé un atelier à Schaerbeek...juste au bout de la rue d'Aarschot (rue de prostitution) et je passe donc dans cette rue pratiquement tous les jours, à vélo ou à pieds.
Voilà un comportement que ma psy aurait du me conseiller il y a bien longtemps.
Les prostituées, par leur seule présence et par le jeu des regards, des signes, des gestes, des appels m'apprennent quotidiennement à revoir et à changer le regard inquiet et incertain que je pose sur la peau des femmes.
Au début, je passais assez rapidement sur le trottoir d'en face, regardant le cirque de la rue dans son ensemble, comme pour essayer de me familiariser à l'endroit et éviter de me confronter au regard honteux que le désir animal de la chair refoulé par la culture(bioéthique) me poussait à lancer à ces femmes en sous-vêtements, parfois enfantines façon 'fifi brin d'acier' parfois dominatrices, armées de fouet, déguisées en infirmière, grosses, minces, vieilles, jeunes et tenant toujours leur rôle de composition à la perfection, car si il existe un théatre où tous les comédiens sont comédiennes et où tous les spectateurs sont des hommes attirés dans le jeu par le bout de leur queue à tête chercheuse,c'est bien cette rue....seule chose qui semble réelle dans cette rue est la pulsion qui nous y mène... je ne m'exclus pas du groupes des hommes radio-guidés.

Il m'a fallu un peu de temps avant de me familiariser à l'atmosphère du lieu, avant de rouler sur la rue et ensuite de passer, parfois à peid, sur le trottoir où se trouvent les vitrines....celui où, si vous vous tenez debout, les yeux tournés vers l'intérieur des habitations, vous vous retrouvez nez à lèvres avec le sexe athlétique d'une professionnelle virtuose...
Il m'a fallu un peu de temps pour oser regarder leur corps de bas en haut comme pour assumer le désir sexuel, l'affirmer, le revendiquer et surtout, accepter le regard que ces femmes posaient sur moi dans le même temps: accepter qu'elles me regardent les regarder, qu'elles me voient les désirer.....ça ressemble à l'aveu que finalement, moi non plus, je ne suis pas au-dessus de ça. Je ne suis qu'un homme et j'apprends seulement à l'assumer...sexuellement,veux-je dire...


Et je me familiarise peu à peu à la rue...la gène disparaît, les montées d'anxiété, les tremblements qui m'ont envahis les première foie que je passai au ras des vitrines disparaissent(Il me reste, pour apprendre à conjurer définitivement cette anxiété, à rentrer dans un bordel en étant parfaitement sobre, à répéter l'expérience et à en tirer des leçons t du plaisir jusqu'à ce que l'inquiétude ait définitivement disparu.....a suivre.) et j'accepte la duperie inhérente au jeu de séduction....je veux dire: quand des prostituées vous font signes tout au long de la rue, vous arrivez en bout de course avec un sourir narcissique et un début d'érection...bien sûr , elle ne font que leur boulot, bien sûr elle vous oublie dans la seconde qui suit, bien sûr vous n'y croyez pas.....et pourtant les signe vous imprègne jusqu'à vous rendre crédule sans y croire....c'est un paradoxe courant.

Le jeu de la séduction repose aussi là-dessus: personnes ne connaît les intentions réelles de l'autre, mais tout le monde à envie de croire aux signes qu'il/elle laisse passer(et même quand on connaît ses intentions on a envie d'y croire, parce qu'aussi:les nôtres ont plus de poids).....a moins d'être PS et de lui prêter des intentions malsaines....une femme qui assume sa sexualité sera toujours flattée par le désir que lui manifeste un homme, et 'demandeuse' si l'homme lui plaît et qu'elle est disponible (et parfois, même quand elle ne l'est pas, mais gaffe au coups de poings qui se perdent).

Ainsi, les intentions de chacun peuvent être ignorées facilement dans les premiers temps de la séduction, pour laisser s'exprimer le petit narcisse orgueilleux, avide de reconnaissance affective et sexuelle qui sommeille en chacun de nous....

C'était ma petite leçon du moment.

vendredi 9 mars 2007

6. Thérapie.

J'ai hésité à publier ce qui suit car cela peut-être très ennuyeux pour qui ne vit pas le problème, mais je me suis finalement dit que les gens souffrant de phobie sociale pourraient y trouver quelques repères et encouragement qui les aideraient à progresser.
C'est donc essentiellement à eux que ce texte s'adresse.

Au début du mois de février 2006, je suis allé me présenter à l'accueil d'un hôpital dont j'avais trouvé l'adresse sur le net. Il y avait là une équipe de psys spécialisés traitant les troubles de l'anxiété dont la phobie sociale. Aller vers eux fut très difficile, téléphoner à mes grands-parents pour leur demander une aide financière afin de surmonter un problème dont ils ignoraient tout le fût encore plus et mes sanglots m'empéchèrent d'articuler la moindre phrase au premier appel...mais finalement j'ai commencé cette Thérapie Cognitive et Comportementale. La certitude que tout ça était surmontable et que j'allais m'en sortir, associée à la culpabilité de faire payer cette thérapie à mes grands-parents me firent étudier la méthode tcc avec toute l'application dont un universitaire est capable en période d'examen. J'en ai étudié tous les mécanismes, j'ai établi une véritable cartographie de ma perception en termes tcc et j'ai commencé par m'imposer une humilité dont je n'avais jamais su faire preuve jusque là:" je me trompe. Les connaissances que j'ai acquises concernant les autres et le rapports que j'entretiens avec eux sont faux. Je suis dans l'erreur. Il va falloir lâcher prise et remettre tout en question, malgré cet orgueil qui me pousserait plutôt à imposer mes vérités...Ce que je crois connaître des autres est dysfonctionnel, faux, obsolète, à jeter...c'est de la merde. Je dois tout oublier, me laisser guider et réapprendre...." franchement ça calme....il va falloir passer de la condition de 'pleutre orgueilleux' à celle d' 'adapté ordinaire'....moyen, commun....et même parfois pas très brillant....et accepter qu'on puisse m'aimer ou m'apprécier comme ça....alors que moi, j'en étais incapable. Alors que moi, au fond, j'étais terriblement exigeant envers les autres comme envers moi-même.


Tout commence avec une condensé des notes trouvées sur 'anxiétsociale.org' :


<<1) Généralisation : (mise en place des croyances, des jugements de valeurs). C’est le processus qui vise à tirer une leçon générale des événements particuliers, premier filtre entre nous et la réalité. Ainsi, on établit des croyances, jugements de valeur.
Construite sur des éléments du passé, la généralisation permet d’installer une illusion de contrôle, illusion de comprendre le présent et de prévoir l’avenir. On entrevoit aisément, à la fois son effet rassurant à court terme mais aussi son effet pernicieux à moyen et long terme.
2) Sélection, omissions et distorsions : Ayant mis en place des croyances, on sélectionne ce qui vient confirmer le système, renforcer les croyances. On en vient à distordre l’information pour qu’elle puisse entrer dans ce cadre de référence.
3) Filtres : Nous filtrons donc la réalité, cela plutôt deux fois qu’une :
-Filtre neurologique : notre perception de l’extérieur dépend de notre cerveau, de notre système nerveux, de la perception par les sens.
-Filtre culturel, social : nous apprécions la réalité selon les critères du groupe auquel nous appartenons.
-Filtre personnel : chaque individu est unique et aura donc une conceptualisation du réel personnelle, en fonction de ses différentes expériences( éducation, influence familiale, sociale, événements de vie…).
Un des buts en thérapie ou coaching sera donc d’observer la carte du monde établie par le sujet et de la recadrer de manière adaptée au bien-être.

Neutraliser l’anticipation en développant ses compétences sociales.


-->Performances insatisfaisantes, auto-dépréciation, honte, non-développement des compétences.-->Anxiété sociale-->Accentue, chronicise-->Inhibition

Restructuration cognitive

Ce n’est pas la réalité que nous ressentons, mais ce que nous pensons de la réalité.

.Situation.-->.cognitions.-->.émotions.-->.comportement.

-Un schéma est inconscient --> prendre conscience des schémas.
-Un schéma paraît indiscutable et rigide remettre en cause ces schémas, les discuter.
-Le schéma va orienter tout traitement de l’information. Ce qui vient le confirmer est amplifié, ce qui lui est contraire est minimisé --> mettre en valeur ce qui ne vient pas confirmer le schéma, réajuster la lecture du réel.
-Un schéma surgit à travers l’émotion, sans nécessairement passer par la conscience et son traitement logique --> faire un examen conscient et logique des schémas.
-Le schéma n’est pas traité de manière logique, mais est donné comme vrai --> expérimenter la vérité du schéma.
-Pour atténuer les effets du schéma, l’individu va mettre en place des comportements dysfonctionnels --> modifier le schéma et par la même, les comportements compensatoires.





La phobie sociale se développe à partir de deux modèles:

1) Modèle comportemental
La phobie sociale résulte d’un apprentissage.
Deux cas de figure:
-apprentissage d’une conduite dysfonctionnelle: en clair, le sujet prend comme exemple des individus ou relations déjà problématiques(ex: parents peu sociabilisés, peu tolérants ou peu affectifs).
-apprentissage non référencé: le sujet n’a pas de référence, d’exemples d’un comportement social adapté.

2) Modèle cognitif
La phobie sociale nait d’un mauvais traitement de l’information:
-le danger vécu, expérimenté est intégré(stress chronique durant l’enfance, exemple familial et/ou social d’anxiété, traumatismes divers).
La réalité(ici les relations sociales) est ensuite interprétée en fonction de dangers potentiels.
-un sujet phobique social a une conscience déformée de lui-même:image négative et sous-évaluation.


-“Les phobies sociales” D.Servant/Masson.
-“Précis de thérapie comportementale et cognitive”G.Mihaescu/
Edition Médecine et hygiène.
-“Précis de thérapie cognitive”C.Mirabel-Sarron, B.Rivière/Dunod
-“Manuel de thérapie comportementale et cognitive” B. Samuel-Lajeunesse/Dunod


-Exemple de schéma cognitif
1)Le sujet pense se conduire de manière ridicule ou inacceptable.
2)Il craint des conséquences négatives telles le rejet, la dévalorisation son image ou de son statut.
3)Ces pensées font naître le phénomène anxieux :
-les symptômes anxieux(tremblement, rougissement…) deviennent eux-mêmes des signes de danger et viennent nourrir l’anxiété.
-L’ hyper vigilance aux manifestations somatiques et aux pensées entraînent une baisse des compétences sociales : le sujet est tourné vers l’intérieur(pensée, corps), non vers l’extérieur(la relation).
-Les comportements d’évitements, de fuite entraînent chez l’autre des comportements sinon similaires du moins altérés.
4)La performance sociale est insatisfaisante.
5)L’anxiété est nourrie, développée. Les compétences ne se développent pas…Retour en 1)

La démarche doit être autant pédagogique que thérapeutique : acquérir les compétences suffisantes. Tout sentiment d’incompétence peut se corriger par un apprentissage.>>>


Ensuite j'ai commencé à tout jeter sur le papier: mes comportements, mes interprétations de ces comportements, mes affirmations conscientes et mes attitudes paradoxales face à ces affirmations...


<< Faire disparaître ces mécanismes et ne plus rien cacher. L’anxiété n’est pas une honte, la timidité non-plus, la maladresse non-plus. Je n’ai rien à cacher.

Peur grandissante de décevoir les gens qui portent sur moi un jugement favorable a priori.
Peur d’autant plus grande si ces gens font partie d’un groupe de personnes que je connais --> Le jugement défavorable, la déception feraient de moi l’exclus.

Les phobiques ont tous un rythme très particulier. Beaucoup de blancs dans leurs conversations ne laissent pas deviner ce qu’ils pensent. Beaucoup de non-dits. Beaucoup de ‘pauses réflexions’ qui semblent « cacher » leurs raisonnements.(Apprendre à tout dire. Ne rien cacher) Ces blancs correspondent au temps d’assimilation, ou d’approfondissement de ce qu’ils viennent d’entendre. Les ‘non phobiques’ restent plus superficiels et enchaînent donc plus rapidement.(Le blanc correspond au moment ou le phobique se tourne vers l’intérieur--> éviter de se tourner vers l’intérieur).

Les « trous-blancs » des phobiques sociaux ne sont pas de même nature que les « trous-blancs » ‘normaux’ car ils s’accompagnent d’un malaise qui rend la possibilité de sortir du « trou- blanc » assez difficile.

Plus que d’ autres, j’imagine un modèle d’équilibre de comportement idéal auquel je ne correspond pas.
Il n’y a pas d’image d’équilibre idéal à adopter.
--> Expérimenter la vérité de cette affirmation.

Si on est capable d’accepter le pire, on est capable d’accepter le reste. L’acceptation du jugement le plus négatif implique l’acceptation du jugement en général. ACCEPTATION

Avoir peur, c’est accorder une importance trop encombrante à l’objet de la peur. Oublier cet objet, se débarrasser de l’état d’hyper vigilance, c’est se débarrasser de la peur.




Quelques commandements :

-Définir les principes susceptibles de conférer un caractère infini à toute conversation. Définir les ‘natures’ d’une conversation.
-Fixer mon attention sur le désir, la volonté --> apprendre à nourrir ma volonté. Expérimenter.
-M’ imposer l’incrédulité face à toute tentation d’anticipation.
-Etablir une liste de sujets de conversation «d’amorçage » …sujets susceptibles de lancer la conversation.
-Apprendre à aimer l’hyperactivité grandissante dans une situation anxiogène. Canaliser cette énergie. Ne pas identifier ça comme de la peur, mais comme une énergie positive.
-Apprendre à sortir des trous blancs --> établir la mécanique des trous blancs.
-Ne rien avoir à cacher. Ne rien cacher, c’est supprimer la possibilité du doute que les autres présument ou savent ce que je cache…ne rien cacher mais énoncer de façon à ce que ce soit socialement acceptable, ou avec l’humour qui laisse percevoir une grande distance ou la banalisation personnelle du ‘problème’.
-Ne pas essayer de connaître, définir ou circonscrire d’avance ce que va être une conversation ou une relation.
-Aborder toute relation d’un positionnement unique, et non en adoptant un regard extérieur…éviter l’auto- observation.
-Eviter de penser à la place de l’autre. Eviter de lui attribuer ma peur de l’ennui.
-L’ hypersensibilité et la phobie sociale sont des amplificateurs. Apprendre à minimiser ce qui est ressenti.
-Accepter le jugement le plus sévère sur moi-même. Accepter ce jugement, c’est accepter tous les autres a priori.
-Ne pas considérer que les autres attendent quoi que ce soit de moi.
-Etablir un conditionnement, des réflexes simples, des automatismes reposant sur ces commandements, sans passer par le langage. Ex : je croise une fille, je fixe mon attention sur ce que je vais lui dire et uniquement sur ce que je vais lui dire.
-Ne pas laisser de place au doute, poser des questions pour savoir exactement ce que ressent l’autre ou ce qu’il pense de la situation, de ce que je dis etc …dire ce que je ressens.
-Faire passer mon désir avant la susceptibilité excessive de mon ego.
-Etre moins exigent envers moi-même.
-Baisser le bouclier et me dire que je vais passer un bon moment plutôt qu’une sentence ou qu’attribuer à l’autre la volonté de me jauger. Ex : je te préviens, au début je suis toujours un peu timide…j’attribue ça au fait que j’ai tendance à sacraliser et idéaliser la femme. Je la mets sur un piédestal…ce qui entraîne systématiquement une déception quand je commence à la connaître *rire*.
-Le conditionnement passe par ma projection de moi-même dans les situations anxiogènes, en adoptant les principes susmentionnés.
-Le charme, la séduction passe par la perception d’un nombre important de signes qui dépassent largement le contenu du discours. Ces signes sont plus difficilement perceptibles par le sujet qui les émet que par son interlocuteur(trice). >>>

Le phobique social est comparable à un homme écorché: au début il se laisse approcher, on le touche et ça le fait hurler de douleur. Ensuite il se méfie, mais avec prudence, il se laisse encore un peu approcher....on le touche et ça le fait hurler de douleur....avec une extrême prudence il se laissera encore approcher, effleurer....et il en souffrira toujours autant, alors il s'isole. Il anticipe, il fuit et refuse qu'on l'approche. C'est trop tard car il sait que ça va lui faire mal......il doit apprendre à se confectionner une combinaison perceptive plus ordinaire, plus adaptée....

L'enjeu est proche de ce que la philosophie appelle la pensée réflexive, c'est-à-dire la pensée qui se prend elle-même comme objet de pensée...et c'est à mon avis le mode de pensée dont devrait nous munir l'enseignement, dès notre plus jeune âge, au lieu de nous faire assimiler des préjugés culturels définitifs et de nous faire ressasser des âneries véhiculées par des profs ne faisant que de la transmission de savoir de façon mécanique et irréfléchie.
Que l'enseignement nous apprenne à vivre en société avant de nous apprendre l'histoire: Marignan.1515 : ça me fait une belle jambe. C'est pas François 1er qui va m'apprendre à surmonter ma peur des autres...
A combien de personnes cet inestimable savoir va-t-il servir?

Si on veut débarrasser la société de ses névroses en tout genre, il faut commencer par revoir les fondements de l'enseignement...mais c'est un autre débat.

jeudi 22 février 2007

5.Les aveugles et le muet (suite).

...j'étais le grand muet et ma peur se traduisait par une volonté de contrôle absolu, à la fois de moi- même et des autres. Tout définir, tout comprendre, tout anticiper, tout prévoir...toute force engendre un force opposée, toute action engendre une contre-action toute parole est l'impulsion nécessaire à une parole qui lui fera écho...mais pourquoi les hommes éprouvent-ils à ce point le besoin de communiquer? Pourquoi ces flux et reflux, ces échanges de mots souvent creux, vides, gratuits...pourquoi se sentent-ils obligés d'échanger quelques trivialités sans intérêt à chaque fois qu'ils se croisent?
Pour se prouver qu'ils existent et s'estiment. Pour se prouver réciproquement qu'il ont de l'importance aux yeux de l'autre. Pour éviter de déambuler comme des fantômes incapables de trouver leur reflet dans les yeux des gens qu'ils croisent. Pour y déceler, ne serait-ce qu'une toute petite lueur narcissique...à bien y réfléchir, c'est nécessaire et vital à tout être...mais moi, du haut de mon savoir secret, de mon arrogance imperceptible qui prenait la couleur d'une dépression teintée d'amertume et de rancoeur, je ne savais pas ça. Je ne pouvais pas le vivre. Il n'existe pas d'évidence quand on se tient hors de tout. Il faut tout apprendre...
J'avais peur d'eux, j'étais incapable de comprendre les comportements innés de tous ces gens.
Je n'avais pas le mode d'emploi...et la prison se referme de plus en plus. On perd l'habitude de dire 'bonjour'. On perd l'habitude de demander 'comment ça va'. On perd l'habitude de s'intéresser à autre chose que notre propre souffrance. A quoi bon chercher autre chose si on ne peut en parler avec personne? Pourquoi accumuler des informations qui ne feront que nous encombrer? ça n'a pas de sens.
Un hermite n'a pas besoin de se tenir au courant puisqu'il ne fait pas partie du mouvement...et la vanité de toute chose devient beaucoup plus pesante que si on la partage avec ses contemporains...

Et à la fin de mes études, alors que cette fille venait de me quitter, j'étais bien en train de devenir un hermite: en Belgique, les études se poursuivent par un an de stage d'attente. Une année pendant laquelle vous êtes livré à vous-même sans aucun droit à une allocation quelconque...pour vous apprendre à attendre...en bon stagiaire, je retournai attendre chez mes parents...plus d'une année passée à étudier essentiellement Deleuze et Guattari, à m'informer sur l'art, et à édifier un volumineux dossier destiné à convaincre les galeristes bruxellois.
J'ai terminé le dossier. Je l'ai apporté à un galeriste......et je n'ai plus osé aller le rechercher.
Je ne l'ai récupéré qu'un an plus tard.
Un an à étudier dans l'isolement de la campagne. Un an à ne voir que ma famille....

J'ai tout oublié. Je savais regarder le monde. Je savais l'analyser. Je comprenais bien comment tout ça fonctionnait.....mais j'avais oublié comment dire 'bonjour' à quelqu'un.
J'avais oublié qu'on pouvait s'intéresser à autre chose qu' à des livres ou des informations abstraites...je suis retourné habiter à Bruxelles en me faisant violence....et je n'y connaissais plus personne. Le début à été rude....incroyablement rude. je me sentais perdu , paumé, seul et il me semblait impossible de faire connaissance ou d'aller vers ces gens qui me faisaient flipper à chaque fois qu'ils approchaient.....là, j'ai vraiment pété un plomb.
Je ne voyais qu'un ami de temps en temps....un autre, encore plus rarement.Et j'ai essayé de prendre des cours d'anglais que j'ai arrêté...je me balladais souvent seul en rue, parfois tard le soir. Je rentrais chez moi et je pleurais....ou je buvais afin de m'anesthésier. "-aujourd'hui, je me tire une bouteille de vodka dans la tête".....mais tout ça dégouline d'un pathos sur lequel je n'ai pas envie de m'attarder...

Donc, je ne savais plus rien du peu que j'avais acquis dans le domaine des relations humaines.
Les autres, c'est la grande inconnue....comme quand vous entrez dans une voiture pour la première fois afin d'apprendre à conduire. Comment ça marche?
Il faudra un peu de temps avant que tout ça ne devienne réflexe...il faudra un peu de temps et beaucoup de pratique...

Mais on en est encore loin...la période dont je vous parle était vide de sens, d'apprentissage et pleine des regards supposés malveillants du reste de la population.
Rétrospectivement, je trouve ça complètement fou....mais j'avais peur d'appeler mon ami aussi , et je ne le faisais qu'avec d'infinies précautions, en tremblant...et très rarement...faut pas déranger.

.J'entre dans un café pour rejoindre deux amis m'ayant invité. Il se lancent un regard complice en conversant: ils me trouvent idiot.
.Un des deux (celui que je connaissais le moins) termine son verre et nous quitte: je l'ennuie.
.En rue,j'aperçois un visage familier au loin: je change de direction.
. Un vendeur m'interpelle: je n'ai pas le temps.
.Je croise une fille dans la rue. Elle me regarde. Je la regarde. Je passe mon chemin...elle habite mon quartier. Je la croise une seconde fois?Une troisième, quatrième, nième fois....toujours le même scénario. Elle me plaît.....un jour, je la vois et là , c'est sûr, je vais aller lui parler, je la suis, je m'approche de plus en plus, je tremble de plus en plus. Tout mon corps n'est plus que tremblement. Je m'arrête. Je me hais. Je me sens révolté. Je rentre chez moi. Je vide une bouteille de vin blanc. Je lui écris un petit mot en y ajoutant mon numéro de téléphone. Je suis pété. Je vais glisser le papier dans sa boîte aux lettre. Le lendemain matin, je reçois un sms. Numéro inconnu. Je tremble instantanément. Je lis.:"hier, tu as laissé un drôle de message dans ma boîte aux lettres. Qui es-tu? "Je tremble terriblement. Je réponds, mais je n'appuie sur la touche 'envoyer' qu'en serrant les dents, en fermant les yeux, en me forçant à penser à autre chose....n'importe quoi, mais il faut appuyer!"
L'échange se poursuit. Les sms ne laissent pas percevoir l'anxiété. Ce n'est pas elle, c'est sa voisine. Je me suis trompé de boîte "je vois trop bien qui tu es! Laisse là tranquille!"

Je suis fou. Je suis complètement fou...

Parallèlement à ça, je commence à m'intéresser à la description théorique de la phobie sociale...termes découverts par hasard et dont je n'avais jamais entendu parler avant.

Je vais suivre une thérapie. Ce n'est plus possible. Je ne peux plus vivre comme ça.

mercredi 21 février 2007

4.Les aveugles et le muet.

Avant de continuer à raconter la merveilleuse histoire de mon ascension sociale, j'aimerais m'attarder un peu sur ce qu'est la phobie sociale, comment elle est vécue et comment elle est perçue par les autres. En gardant bien à l'esprit que je ne fais que me raconter et que tous les gens qui souffrent de ce que la psychologie appelle, en terme générique: 'phobie sociale', ne vivent pas forcément la même chose.....mais on fait quand-même partie d'un même 'genre' et mon histoire semblera probablement familière à toute personne ressentant la peur des autres....

Le phobique social est une personne qui est incapable de s'exprimer, qui intériorise tout, qui ne se sent pas digne d'être entendu, qui estime que ses problèmes n'intéressent personne, qu'il serait déplacé de les dévoiler, qui ne veut pas déranger, irriter, vexer, blesser, ni s'exposer, se révéler ou s'affirmer....alors son comportement engendre inévitablement une communication dysfonctionnelle. Il passe pour une personne calme, pleine de retenue, de maîtrise de soi, de sagesse, de gentillesse.....Il sait écouter. ça oui! ...il passerait même souvent des heures à écouter un angoissé lui déverser tous ses problèmes, ses craintes, ses échecs, ses amertumes dont il n'a que faire....mais ça l'arrange tellement de ne pas avoir à parler et de sentir que, quand-même, quelqu'un lui reconnaît cette qualité là: il est une oreille attentive.

D'un côté je suis un type calme, sage et observateur.
D'un autre côté je tremble, je me disloque, je me décompose, je perds jusqu'à la faculté de construire une phrase.
Voilà exactement le paradoxe et l'incompréhension dans lesquels doivent vivre tous les gens souffrant de phobie sociale:
il faut croire que les années de peur développée dans la cour de récréation, les années d'incapacité à communiquer entretenue par une famille en déséquillibre, complètement refermée sur elle-même, ne voyant pratiquement personne et faisant tout pour cacher les frasques éthyliques et suicidaires du père de famille car, mon Dieu.....que diraient les voisins!?...il faut croire,disais-je que cette accumulation d'angoisse, de peur, de tristesse, de déception, de blessures et d'amertume grossissait en moi comme une masse d'énergie qui, n'étant jamais libérée, menaçait d'exploser à chaque fois que mon corps se trouvait à une distance permettant la possibilité d'une communiction avec un(e) inconnu(e)...et plus je tentais l'approche, plus l'angoisse grandissait...ça se traduisait par un tremblement physique incontrôlable....les mains d'abord , les jambes ensuite , et par une inhibition qui m'empêchait de construire une phrase, même d'une extrême simplicité....car dans cet état là, tout ce que vous pourrez dire vous semble déjà grotesque au point qu'il vous devient impossible de le prononcer...et comme votre voix à suivi le reste de votre corps, vous ne pouvez plus le dire que maladroitement, avec la voix ridiculement tremblante , en ayant l'impression d'être l'extra-terrestre que personne ne va comprendre, qui va s'humilier lui-même tellement ses propos sont insipides et empreints, avec ça, d'une émotivité déplacée pour le peu d'importance de ses paroles.....autant ne rien dire!

"-Laurent....oh, il a toujours été calme. Il s'en fout laurent. Il s'en fout de tout....le jour où il s'en fera pour quelque chose vous savez....."

Et la révolte grandissait en moi comme une petite boule de neige lancée du haut d'une montagne....ça roule, ça grossit et puis c'est l'avalanche....ça ravage tout. ça détruit tout. Impossible de communiquer....de moins en moins....et du haut de cet orgueil d'enfant-roi, resté intact, je pouvais encore observer les dégats.....mais sans aveux, sans laisser tomber le masque. Je suis imperturbable, vous ne trouverez pas la faille. Vous ne trouverez pas de critique à formuler. Vous ne trouverez pas de raisons valables pour me rejeter, me railler, me toucher....
Je suis un type calme. Extrêmement posé, réfléchi, rationnel, souriant, ouvert, tolérant......pas le moindre petit défaut à vous mettre sous la dent...

Mais ces défauts, ces limites, ces maladresses, ces trous de mémoire, ces imperfections, ces jalousies parfois, étaient bien là....et ça faisait beaucoup de choses à cacher. Beaucoup trop.

La retenue grandissait, le nombre des tares, des défauts, des imperfections à cacher grandissait au point de ne plus former qu'une grande masse informe et unique constituant mon identité indéterminée inavouable , sinon au prix d'une lourde humiliation qui était la sanction promise à toute tentative un peu trop téméraire.....à partir de là, je craignais le regard de la boulangère, j'angoissais à l'idée d'aller louer un dvd au vidéoclub du coin, je tremblais en commendant un verre au bar, je déclinais les invitations, j'évitais les réunions, les vernissages, les rencontres de toutes natures, je fuyais les filles....

Dans un premier temps, vous enregistrez les blessures, les agressions, les humiliation....dans un deuxième temps, vous apprenez à vous méfier, vous anticipez et vous êtes extrêmement vigilent.
Dans un troisième temps, vous oubliez les causes de votre méfiance extrême....il reste juste une peur irrationnelle....mais vous n'y pouvez rien. Elle est là et vous savez que cest stupide, qu'il n'y a aucune raison d'avoir peur.....mais vous n'y pouvez rien. C'est comme ça. On n'arrête pas un corps qui tremble. On ne dompte pas un esprit qui se décompose...

Et du haut de mon orgueil toujours intact, je me détestais secrètement, je me méprisais avec un sourir bienveillant affiché sur le visage, je me détruisais lentement et je me punissais d'être incapable de m'ouvrir aux autres, de dialoguer sans avoir envie de fuir...

Car tout le drame du phobique social se touve bien là: il est incapable de communiquer normalement, de se plaindre, de critiquer, d'avouer ses faiblesses, ses indélicatesses ou ses torts....il en souffrira toujours car il ne percevra jamais cela comme étant 'la norme', mais plutôt comme autant de possibilité de se faire humilier...

J'étais l'enfant-roi, la perfection absolue et celui qui se devait d'être parfait.
J'étais le roi humilié, le torturé des cours de récréation.
J'étais le roi muet qui ne laisserait plus apparaître la moindre petite imperfection afin de ne pas trahir son inestimable orgueil...
Mais:
"-il s'en fout de tout Laurent....il est calme."

mardi 20 février 2007

3. La cour des fous.

...et je vins habiter à Bruxelles pour suivre des études en arts-plastiques, fermement décidé, du haut de mon insondable ignorance , à révolutionner le monde des arts comme d'autres l'avaient fait avant moi...et soudain de la cour homogènes des juges ordinaires je passai à la cour des épicuriens fous, des drogués, des alcoolos, des hommes-femmes, des femmes-hommes, des punks, des baroques, des dandys, des révoltés, des bourges, des trashs, des cools, des loufs, des m'a-tu-vu-quand-je-lance-de-le-peinture-sur-ma-toile et-que-je-suis-un-génie, des perdus, des auto-destructeurs, des expérimentateurs......et j'ai rapidement fait partie des intouchables.
Il m'était impossible de m'adapter, impossible de prouver quoi que ce soit car j'ai rapidement compris que ma médiocrité artistique valait la leur...impossible d'aller vers eux car les mécanismes de pensée qui définissent la phobie sociale ne faisaient que se renforcer, se durcir et me paralyser de plus en plus. Le moindre regard devenait un coup de poignard, la moindre parole était tenue à distance, évaluée et rejetée quand j'avais enfin détecté l'intention malsaine qu'elle cachait...inutile d'aller plus loin. C'est trop dangereux. Vous ne me voulez que du mal. Je préfère rester seul.
Et les mécanismes d'auto-observation se renforçaient également, car il ne s'agit pas de laisser transparaître la moindre faiblesse, la moindre maladresse, la moindre ignorance...Non!
Vous ne m'aurez pas. Je ne vous laisserai pas l'occasion de me critiquer, de me trouver stupide, de dévoiler mes faiblesses qui vous donneront l'occasion d'agir une fois de plus, comme tous les juges de récréation que vous êtes...

L'auto-observation , c'est ce mouvement de conscience qui oblige l'individu à surveiller , peser, évaluer chaque mot avant de le délivrer. Plus aucune spontanéïté n'est possible. Plus aucune opinion n'est exprimable à l'état brut.
Les mots sont des lames de rasoir qu'il faut manier avec une extrême prudence...à tel point que les mots deviennent des corps étrangers à nous-même que l'on accepte qu'après avoir pris d'immenses précautions...il 'mest souvent arrivé d'abandonner la phrase que j'avais envie de dire parce que c'était trop tard...la conversation était déjà trop avancée et mon intervention, soigneusement construite, évaluée, soignée n'avait plus sa place dans ce qui était en train de se dérouler et que je n'avais pas suivi, car j'étais arrêté sur ma phrase :"-Laurent, tu n'écoutes pas ce qu'on te dit! - Oh pardon..."
Mais quand je pouvais en placer une, elle était belle...une vraie belle phrase intelligente qui faisait un effet boeuf..."-il ne parle pas beaucoup, mais quand il parle, c'est pas pour rien."
Les citations bien placées font toujours beaucoup d'effet aussi. C'est sans risque, c'est labelisé, ça a déjà été reconnu et ça révèle une grande culture littéraire qui éveille la curiosité. On vous accorde plus de crédit quand vous citez ouvertement Pessoa , Michaux ou Artaud que quand vous reprenez leur parole sans révéler leur nom. Penser par proccuration, c'est plutôt bien vu, si ces noms sont bien brillants et que tout le monde peut les identifier comme les Rolls de l'intellect... "-ah oui, je connais....ce sont de grands hommes!" petite approbation ordinairement narcissique. On ne peut pas dévellopper mais on adhère au même club.

Et le temps des études se déroula avec beaucoup de difficultés...je buvais beaucoup, je dormais énormément, je ne parlais qu'aux gens qui habitaient dans le même communautaire que moi , et un jour ou plutôt un soir de beuverie, car l'alcool était le meilleur des remèdes. Je suis sorti avec une fille qu'un ami de ce communautaire m'avait présentée...enfin....un lendemain de grosse beuverie, j'ai touvé une fille dans mon lit.
J'avais 22 ans et c'était la première fois que ça m'arrivait. Il m'a fallu beaucoup de temps avant de me sentir à l'aise en sa présence, et jamais je n'ai pu m'exprimer ouvertement. Les reproches qu'elle pouvait parfois me faire étaient une véritable torture à laquelle j'étais incapable de répondre...et mon silence l'exaspérait toujours un peu plus:reproches. Mutisme. Reproches. Mutisme. Reproches. Mutisme. Adieu!
Notre relation a duré quinze mois et j'ai aujourd'hui le sentiment de m'être servi d'elle pour me protéger des autres...je ne le regrette pas mais je pense qu'on avait rien en commun.

Et toujours ces mots, ces mots qui blessent, qui griffent, qui torturent, qui culpabilisent, qui excluent, qui fatiguent, qui épuisent, qui tuent parfois.....
Mais pourquoi moi? Pourquoi suis-je aussi sensible au poids des mots?

La science moderne nous dit que la phobie sociale prends souvent racine sur un terrain physiologique particulièrement fécond. Le phobique social est souvent un hypersensible, une personne qui va ressentir les choses beaucoup plus vivement que les autres. un instrument destiné à mesurer la moindre petite variation d'humeur, d'agressivité, d'émotion chez les autres...
J'ai souvent eu l'impression que ce que les autres avaient assimilés, digérés, accépté de façon instinctive....moi, je devais l'apprendre. Tout était d'abord tenu à l'écart comme un menace. Tout est à vérifier avant de laisser passer. La douane est sévère.
Il n'est pas question de laisser entrer une marchandise non contrôlée...


"Il est tout rouge, renfrogné, il est si empoté, si empêtré... il n'y a ren à faire, il ne sait pas jouer... il y a en lui quelque chose... Mais qu'est-ce que c'est? Qu' y a-t-il en moi, Madame, dites-le moi...c'est quelque chose dont je ne m'aperçois pas, c'est comme une odeur que les autes sentent... je suis pourtant exactement pareil à eux. Tout pareil. Juste un peu timide. Cela me conduit parfois à être maladroit. A trop oser... C'est peut-être ça? C'est le sens du ridicule qui doit me manquer... aidez-moi, je voudrais savoir, je ne demande qu'à me corriger... elle soulève ses lèvres molles qui se retroussent très haut, dénuant ses gencives...Oui. Il est bien certain que vous faites inadapté...

Je suis perdu, j'ai peur, je suis seul dans le camp ennemi... sans défense... protégez-moi, j'ai été déposé dans une région dont j'ignore les coutumes, les lois... il y a là un mystère... une menace cachée... peronne ne veut m'éclairer... -c'est vrai, vous ne savez pas. Ce sont des choses poutant qu'on sait de naissance. ça ne s'apprend pas. Ou plutôt on apprend cela tout naturellement, sans en être conscient, comme on apprend à se tenir debout ou à parler. Mais vous, c'est vrai, vous faites inadapté."{ Nathalie Sarraute: 'Entre la vie et la mort'}

lundi 19 février 2007

2.L'enfant-roi de no man's land.

Il faudra probablement que je fasse preuve d'une humilité contre nature pour rédiger ce qui va suivre, mais un homme qui revoit son orgueil à la baisse est un homme qui cherche à respecter ses voisins autant que lui-même et qui choisit de vivre en paix sans juger ni se sentir jugé...
L'ego est au centre de toutes les relations et son hypertrophie comme son atrophie en détermine la nature...

Alors voilà: j'ai grandi dans le monde ouvrier, comme une enfant-roi surprotégé à qui rien ne pouvait être refusé, sauf la reconnaissance paternelle et le modèle comportemental que ce père était censé constituer...
J'ai grandi comme si je ne devais rien à personne et comme si tout m'était dù...j'ai grandi dans une sphère d'illusions imperméable aux réalités sociales que je devrais rencontrer plus tard.
La vie était belle. L'enfance était joyeuse et insouciante, malgré cette petite tâche dans la conscience qui grandissait petit à petit, à chaque nouvelle tentative de suicide de mon père...car j'étais le roi d'un pays où Dieu était un alcoolique dépressif chronique...
Et la sanction était là...plutôt vague au début...plutôt mêlée à la compassion qu'un enfant éprouve pour son père à qui il reste attaché et qu'il admire profondément...mais Dieu disait, lentement, insidieusement, année après année et sans discontinuer:"-je suis ton père, ton géniteur, ton créateur...et tu ne me donnes même pas l'envie de vivre."

Et l'enfant-roi était déjà en train de s'effondrer, d'imploser, de se ronger de l'intérieur sans que personne ne s'en aperçoive...
Tout ce que j'ai entrepris, tout ce que j'ai commencé, créé, construit, Dieu l'a ignoré.
Tout ce que j'ai entrepris, je l'ai abandonné dès que le manque de soutien ou de reconnaissance paternel devenait évident et mon identié se constuisait déjà sur une succession d'échecs, et sur cette phrase qui revenait immanquablement à chaque nouvelle tentative:"-de toute façon, dans deux mois tu vas arrêter..." . Bien entendu, j'arrêtais...comment continuer quoi que ce soit quand l'être qui est au-dessus de tout vous dit que vous n'en êtes pas capable. Il avait raison.Je n'avais pas à discuter. J'étais un incapable...et l'absence de mes parents dans la salle, quand je participais à un concert avec la maladroite fanfare du village, me prouvait à quel point mon activité était inintéressante...mais à ce moment là j'étais déjà adolescent, mon visage bourgeonnait, mon regard se bovinisait, mes cheveux se graissaient et un duvet grotesque que je ne rasais pas, par peur de paraître trop attentif à mon image me poussait sur les joues.......l'enfant-roi allait commencer à apprendre qu'il n'était pas au centre de tout, que l'excessive attention de sa mère ne pourrait plus rien pour lui, qu'il n'était plus ce petit garçon timide,beau, attirant et malin que les adultes aimaient tant...l'adolescence me transformait en crétin disgrâcieux et je commençais tout doucement à ressentir le regard inamical des juges de cours de récréation.
L'enfant-roi du désert voyait son territoire se peupler de tortionnaires, de bourreaux, de sadiques et de railleurs, moqueurs, mesquins, critiques....j'étais à la tête d'un pays occupé uniquement par mes propres ennemis...toujours aussi orgueilleux, toujours aussi secrètement fier, je savais qu'un jour je leur prouverais ma valeur, mais je mettais en place un système de pensée qui consistait à prévoir le rejet, la critique, la méchanceté gratuite de mes semblables à mon égard...je devais me préserver et je ne pouvais le faire qu'en anticipant la violence orale des autres.....anisi, tout doucement, la timidité se transformait en phobie sociale....j'étais un incapable aux yeux de mon père, une merde sans intérêt dans la cour de récré et d'un orgueil bien trop grand pour moi-même...ne pas être à la hauteur de son propre orgueil est une source de souffrance terrible pour un homme...surtout quand le monde entier semble vous confirmer que vous ne l'êtes pas.Heureusement il y avait ma mère pour me protéger, me réconforter et m'isoler du reste du monde...il y avait ma mère pour m'aider à faire de moi un inadapté en comblant le manque affectif qu'engendrait sa vie conjugale....

dimanche 18 février 2007

1.Silence et tremblements.

Je vais mieux. je ne flippe plus. je ne fuis plus. je ne panique plus. je n'évite plus les gens afin de ne pas avoir à leur parler. Je ne déteste plus croiser mon reflet dans un miroir. Je ne me méprise plus. Je ne me détruis plus. Je ne hais plus la planète entière. Je n'essaie plus de me faire détester avant que les autres le fasse, afin d'exister au moins par le rejet. Je commence à vivre un peu et je peux parler à la première personne sans avoir l'impression de me donner trop d'importance...
Et si je commence ce blog c'est que j'éprouve le besoin de jeter tout ce que je cache à la meute afin de m'en débarrasser une fois pour toute, car je pleure encore un peu trop souvent sur moi-même et j'ai le sentiment que l'acceptation de mon passé et de mon comportement de misanthrope par les gens que je cotoie, que j'apprécie ou que j'aime me délivrera de ces crises de larme...si ils ne l'acceptent pas, au moins, ils sauront...
Mais j'ai longuement hésité avant de commencer la rédaction tellement personnelle de ce texte. Je ne veux pas m'apitoyer sur moi-même, je ne veux pas de compassion, je ne veux pas me retrouver face à des regards de chiens battus posés sur ma condition de victime auto-proclamée...et je ne veux pas embarrasser les gens qui croyaient me connaître et découvriront que le mépris affiché ne cachait qu'une peur insurmontable...car le diagnostique existe et il tient en deux mots:
'Phobie sociale'...j'ai découvert l'existence de ces mots voilà plus d'un an. Je me suis très rapidement reconnu mais je ne l'ai pas accepté immédiatement...il m'a fallu deux ou trois mois avant d'étudier la question un peu plus profondément et encore un peu de temps avant de contacter une thérapeute cognitiviste et comportementaliste...'phobie sociale' sont des termes bien commodes pour décrire un gros sac de noeuds névrotiques qui révèlent une attitude, une réaction de peur et d'inhibition face aux gens rencontrés, mais ça ne révèle aucune cause car elles sont différentes et à découvrir chez chaque individu...elles sont à la fois physiologiques et culturelles...hypersensibilité, cognitions...j'y reviendrai.
MA phobie sociale,comme celle de chaque phobique, est bien singulière mais elle ne fait pas partie de mon identité. Bien au contraire : elle m'empêche de me révéler tel que je suis vraiment et elle m'empêche de m'exprimer comme je le voudrais. Elle me paralyse et me sclérose au point d'en suffoquer et de ne pouvoir m'exprimer comme je le voudrais...mais c'est du passé et je n'en parle au présent que par habitude. On ne se débarrasse pas d'une habitude aussi facilement...même de la plus mauvaise. Quand elle est adoptée, la pire des souffrances devient un repère auquel on tient ...car on ne sais pas contre quoi on pourrait la troquer et ça, c'est flippant...mais je vais mieux. Je ne suis plus phobique social....mais qui suis-je? Quel sont mes désirs? Suis-je certain de pouvoir être autre-chose que ce que j'ai toujours été? Suis-je vraiment capable d'assumer cette nouvelle liberté qui se présente à moi et qui, vue d'ici, ne représente qu'un grand gouffre, qu'un grand vide à combler...?

Je me prénomme Laurent, j'aurai 33 ans le 9 mars 2007 , je n'ai jamais travaillé. J'ai végété en me cachant derrière le prétexte que je voulais être artiste et rien d'autre...mais j'ai toujours eu peur de me retrouver devant un employeur qui allait m'évaluer et j'ai peur du travail lui-même... j'ai beaucoup plus de souvenirs de ce qui aurait pu se passer que de souvenirs de choses vécues....je me souviens de filles avec qui j'aurais pu vivre un idylle ou juste un bon moment et que j'ai évitées après les avoir regardé. Je me souviens avoir évité pas mal de sorties entre potes grâce à des prétextes bidons. Je me souviens avoir pris les petites rues du centre ville, parallèles à l'artère principale, afin de pas croiser de gens que je connaissais. Je me souviens ne pas m'être rendu à un Rendez-vous avec une fille que j'avais embrassée en soirée et m'être fait jeter ensuite...et je me souviens avoir vécu de véritables crises de paranoïa, en boîte où j'observais les gens parlant de moi en collant leurs bouches à l'oreille de leur interlocuteur...ou dans ma chambre d'étudiant, en collant mon oreille à la porte pour essayer de comprendre ce que les autres étudiants disaient de moi...
Mais jamais je n'ai révélé de telles choses car je savais très bien que je délirais totalement et j'avais assez de lucidité pour n'en laisser rien paraître...alors, je feignais, je souriais, et je buvais quand l'envie de mourir devenait trop pesante...

Je prends déjà un peu de recul et me demande pourquoi j'écris tout ça.....je crois simplement que c'est nécessaire si je veux donner une idée assez précise de ce que je suis aujourd'hui, au gens que je fréquente...ça fait partie d'une progression dont ce blog est , je l'espère, la dernière étape, car de tout cela il reste un type solitaire, distant, voire froid qui ne va que très difficilement vers les autres et reste égoïstement concentré sur ses petits objectifs de proximité et porte des oeillères afin d'éviter la contagion...

Qu'est-ce que la phobie sociale? ...le peur d'être jugé, jaugé, évalué, rejeté, critiqué, raillé.... la peur de voir le reflet de notre être diforme dans les yeux de l'autre....la peur de trouver chez l'autre, la confirmation de notre médiocrité, de notre bêtise, de notre inintérêt , de notre grand vide existentiel.....perception dysfonctionnelle: si je ne m'aime pas, je ne peux pas imaginer que d'autres puissent m'aimer, si je me déteste, je ne peux pas imaginer qu'il puisse en être autrement pour les autres. Donc: si je me déteste, les autres me détestent. Si je me touve con et sans intérêt, le reste de la planète me trouve con et sans intérêt.
Mettez-vous dans la peau d'un type qui est rejeté et raillé par le reste de la planète et vous aurez une idée assez précise de ce que vit un phobique social....mais il est le seul architecte de cet édifice mental. Le phobique social s'invente une planète d'où il est rejeté. Il en souffre réellement et se met à trembler face aux inconnus qui ne sont jamais perçus comme bienveillants...

La phobie sociale, c'est la sur-évaluation de ce que les autres attendent de nous, la sous-évaluation de ce que l'on peut ou de ce que l'on vaut, c'est l'interprétation des réactions ou paroles des autres en notre défaveur et c'est une auto-observation constante qui nous oblige à surveiller la moindre de nos paroles comme si elle avait une importance vitale...